Par Laurent CHATEAU
Particulièrement exigeant, ce 3è article traite plus spécifiquement des grands concepts du retour à l'Origine et de la Voie de l'Immortalité.
Les passages en italique ci-dessous sont extraits de l'ouvrage d'Isabelle Robinet et proviennent la plupart du temps de grands maîtres de la tradition taoïste. Ils reprennent les notions les plus significatives de l'alchimie interne mais sont loin de décrire les nuances exposées par l'ouvrage dont je vous recommande la lecture.
En gras les points à mes yeux les plus importants.
Bonne lecture.
Le TaïJi et WuJi :
- Les taoïstes font une nette différence entre le WuJi et le TaïJi. Le WuJi est souvent considéré comme précédant le TaïJi et est fréquemment représenté par un cercle blanc tandis que le TaïJi est figuré par un cercle blanc portant en son centre un point et donc une première différenciation. Le Wuji est un état chaotique originel et le TaïJi comme un début de fission et d’organisation.
- TaïJi, l'indifférenciation première, ne s'est pas encore scindée en deux mais il est sur le point de le faire. C'est le moment où la Totalité Un, quiétude absolue est encore là mais sur le point d'accoucher de l'univers en disparaissant. Il représente l’Unité indistincte et originelle qui a donné vie à toute chose par sa scission et vers lequel tendent toutes les disciplines.
- Le Wuji est le « Sans terme » ou le Tao, le commencement qui n’a pas encore commencé. Le Taïji est le « Terme suprême, l’Un, le Commencement du commencement qui commence, la Mère de l’Elixir, principe lumineux inlocalisable qui gît en tout homme et préside au début de l’œuvre. Le Taïji embrasse le « Trois » en ce sens qu’il contient le Yin et le Yang embrassés en une unité.
- Le Taïji est le Chaos des alchimistes qui représente la fusion originelle et ultime, première et dernière, fusion en une seule unité des trois principes de la nature, l’essence (jing), le souffle (qi) et l’esprit (shen) ou en termes bouddhistes, le corps (shen), le cœur mental (xin) et la pensée (yi). Ce Chaos emmêlé du souffle et de la matière que décrit LaoZi est le véritable vide des bouddhistes (de la perception, de la pensée, des actes et de la connaissance). Il correspond au Milieu des confucianistes (Zhongyong), état où aucun sentiment ni émotion ne sont encore manifestés, au-delà du bien et du mal, rapproché de l’état de l’enfance.

Le Xing et le Ming :
- Le Xing est une fonction fondamentale des « trois enseignements ». Chez ZuangZi, il avait le sens de Ziran, « spontané ». Il a pris dans le taoïsme le sens bouddhique de « nature fondamentale » ou « nature propre ». « Aller au tréfonds de sa nature, c’est obtenir la Tao ».
- Le Xing relève du Vide et le Ming du monde (terrestre). Le Xing relève d’ "avant le Ciel" et le Ming d’"après le Ciel". Ce qui est complet dans le Wuji est le Xing. Ce qui se partage dans le TaïJi est le Ming. Le Xing est au Ming ce que le Tao est au Souffle, le premier est « vide », l’autre est « plein », le Ming est lié au corps et au Souffle personnel qui l’habite, le Xing est lié à l’Esprit (Shen ou Xin). Relève du Ming la première partie de l’œuvre (alchimique), celle qui exige une action, tandis que la deuxième qui est de « non-agir » relève du Xing.
- Le Xing et le Ming ont même origine. Ils se constituent en un rapport réciproque l’un à l’autre, comme le Yin et le Yang, le mouvement et la quiétude.
- Le Xing figure l’Unité primordiale antérieure au Ciel, le Ming l’Unité dernière postérieure au Ciel, et la conjonction des deux, l’oubli de toute dualité.
- Pour les néoconfucianistes, le Xing est la nature représentant le Ciel dans l’homme, empêchée et alourdie par le Qi, le souffle qui comporte un élément matériel. Pour les taoïstes, c’est autant le corps que l’esprit, le souffle que l’esprit.
- Le Xing est "la parcelle divine contenue dans l’Esprit suprême antérieur au Ciel" tandis que le Ming est "la parcelle du Souffle contenue dans l’Essence suprême (Yang) antérieure au Ciel" et on ne les distingue l’un de l’autre que parce que nous sommes sur le plan humain et corporel.
- Le Li (Principe) et le Qi sont au plan cosmique ce que le Xing et le Ming sont au plan humain, à cette nuance près qu’il ne s’agit pas du même souffle (souffle originel # souffle matière).
- Les Reins sont la racine du Ming, le Cœur-mental la source du Xing.
- Selon que l’on commence par la « culture » du Xing ou par celle du Ming, on maîtrise tout d’abord soit l’un soit l’autre. Le Ming peut prendre la valeur du Plomb ou du Mercure selon le parti qui est pris. C’est pourquoi les équivalences entre Plomb et Mercure d’une part, et Xing et Ming d’autre part, varient entre les textes.
- Sans le corps, le Xing-Ming n’aurait point de demeure, sans le Xing-Ming, le corps n’aurait point de maître.
- Les bouddhistes ont le Xing pour élément principal et le Ming pour élément secondaire, à l’inverse des taoïstes, ils enseignent que le corps n’est qu’une illusion. Pour les taoïstes, il faut d’abord « remplir le ventre », « nourrir la vie », « garder l’essence », faire naître le souffle par le Souffle et transformer l’esprit par l’Esprit.
- Le Chan est l’école du Xing car il enjoint d’"oublier son corps", de rejeter les soucis, d’arrêter les désirs et de quitter la cupidité.
- L’école du Ming est une méthode à images. L’école du Xing donne un enseignement sans écrits, où il suffit de pointer vers le Xin (cœur-mental/esprit), de voir le Xing pour devenir Bouddha.
- L’école QuanZhen prône la pratique conjointe du Xing et du Ming. Si l’on pratique le Xing sans le Ming, après la mort du corps, le Xing sera un esprit Yin qui ne pourra manifester ses pouvoirs surnaturels. Si l’on pratique le Ming sans le Xing, le corps aura longue vie mais ne pourra s’élever au-dessus du cycle des êtres.
- « Ne cultiver que le Xing mènerait au vide vain », au « fantôme Yin » et non pas à l’esprit Yang lumineux, ne cultiver que le Ming ne donnerait que la longévité mais non l’immortalité ». Ce que les alchimistes taoïstes appellent « l’école du Xing » est le bouddhisme. "Ceux qui ont le savoir inné commencent par le Xing et continuent avec le Ming, tandis que ceux qui ne l’ont pas suivent l’ordre inverse". L’auteur du ZhiYi ZhiMi Lun est d’un avis contraire. Quant à Qiu Chuji de l’école du Nord, il enjoint de travailler le Ming (qui est Yang) de jour et le Xing (de nature Yin) de nuit. Pour les 2 écoles en vérité, cette façon de séparer en un avant et un après est artificielle.
Le Yi :
- L‘intention du Yi n’est nulle part. Elle est sans image, immédiate. Ce n’est pas non plus une activité de l’esprit ni même un état de conscience. Il ne s’introduit pas entre le signe et la réalité mais dans un vide interstitiel, là où il n’y a pas d’espace. Le sens du discours n’est pas produit par lui, il est direct et immédiat.
- C’est par le Yi et son accomplissement qu’on parfait le Shen qui permet l’union du corps et du Xin. L’adepte travaille sur l’essence suprême qui est dans le corps et sur le Souffle primordial qui est dans le Xin. Le Yi est alors la pensée directrice, le Centre « sans Pair », la Cour jaune, l’Embryon d’immortalité, l’Entremetteuse, la Vieille femme jaune, l’Un véritable. C’est par le Yi que le Souffle et le Xin restent constamment dans le palais du Centre. Et lorsque la troisième étape est accomplie, que l’Esprit est retourné au Vide, la quiétude du Yi est atteinte après celle du corps lors de la première étape et celle du Xin lors de la deuxième (Li Daochun). Le ternaire, corps, Xin et Yi est construit très probablement sur le modèle bouddhiste : corps, bouche et Xin, c’est-à-dire geste, verbe et pensée.
Le Yang antérieur au Ciel :
- Que cueille-t-on ? Le blanc qui est dans le noir, le Yang qui est dans le Yin, le Souffle du TaïJi antérieur, la véritable semence, celle qui doit être mise dans le tripode sans quoi la marmite resterait vide. Il se cache dans la brèche de la Création et est né avant la Terre et le Ciel. (ShangYangZi)
- Kan est l’Eau et la lune qui dans l’homme sont dans les Reins qui recèlent et produisent l’essence (jing). Dans cette Essence se trouve le Souffle du véritable Yang qui brûle vers le haut, c’est l’Argent, ou encore le Tigre qui naît dans l’Eau ou le Métal qui naît dans l’Eau, le Plomb ou le Métal véritable, l’Eau divine.
- L’homme durant toute sa vie obéit à ses désirs et ainsi perd son essence et diminue sa force spirituelle. Le Souffle antérieur au Ciel qu’il a reçu s’échappe. (ShangYangZi)
- Le Souffle postérieur au Ciel est en bas et transporte. Elle est dite « char du fleuve » et fait tourner les 5 agents. Il y a ainsi un Yang extérieur et antérieur au Ciel d’ordre cosmique que l’adepte doit intégrer et qui est placé en contraposition au Yin qui est l’être humain, postérieur au Ciel. C’est ce Yang pur que doit devenir l’adepte et qu’il doit placer au Centre. C’est ce Yang dans le Yin enfoui dans l’Eau-Kun qui est le moteur de l’œuvre. (Peng Xiao)
- On va du Yin au Yang puis du Yang au Yin et de même, du Yang au Yin puis du Yin au Yang en accomplissant une boucle mais en retrouvant un Yin et un Yang plus purs.
Nature céleste, nature propre :
- Le monde et la nature humaine obéissent si bien aux mêmes lois que celui qui se connaît, connaît toute chose.
- Pour les taoïstes, la distinction que font les néoconfucianistes entre la « nature de l’énergie-matière » et la « nature cosmique » n’est ni ultime ni fondamentale. Ces deux natures ne font qu’une.
Les Xiang (image) :
- Le terme Xiang désigne couramment les hexagrammes, couplés avec la notion également organisatrice des nombres.
- Les Xiang servent à donner une dimension cosmique à l’œuvre alchimique. Ils sont les médiateurs de l’enseignement alchimique, des explications symboliques des trigrammes, des métaphores relevant de l’ordre naturel, ciel, terre, éclairs, tonnerre et vents, monts et eaux. Le rôle de l’image est un maillon entre la parole et la pensée.
- Le Tao est le Grand Xiang. Visibles mais hors du monde matériel, les Xiang sont à mi-chemin entre le Principe sans forme et les êtres matériels. Ils sont d’ordre céleste et informel par rapport aux choses de la Terre. Les hexagrammes sont issus de la contemplation par le sage de ces Xiang.
- Pour les alchimistes, ils forment le relais entre l’ineffable de l’intuition, l’inexprimable vision de la totalité et la déficience du discours, des intermédiaires entre le plan des Principes (Li) et celui de la pratique (Xing).
- Les Xiang sont utilisés comme des motifs qui peuvent relier entre eux plusieurs niveaux de sens, aussi bien verticalement en profondeur que latéralement.
- Fidèle à ZuangZi, WangBi a souligné l’inadéquation tant de la parole que de l’image et la nécessité de les « oublier » l’une après l’autre pour accéder à l’idée. « Lorsqu’on a accédé à l’image, on oublie la parole. Lorsqu’on a accédé à la pensée, on oublie l’image ». Le Xiang reste un simulacre, il ne fait que montrer. Il faut donc aller au-delà.
Plomb, Mercure, Tigre/Dragon, Garçon/Fille, le Feu… :
- L’essence du Plomb et la moëlle du Mercure sont des métaphores. Le Garçon Kan ou la Fille Li ne sont que des termes vides. Dragon Feu et Tigre-Eau n’ont pas de forme.
- Le Dragon est le Yin dans le Yang, le Tigre est le Yang dans le Yin.
- Les images du Dragon et du Tigre désignent le Plomb et le Mercure, aucun n’est plus vrai ou fondamental que l’autre. Il ne s’agit pas des animaux tigre et dragons, pas non plus des animaux héraldiques de l’Est et de l’Ouest traditionnels en Chine. Le couple Dragon-Tigre n’est qu’un autre nom du couple Yin-Yang.
- « Il existe deux éléments de base : le Mercure qui relève du Bois, du vert et de l’Est et qui, sous l’action du Feu se change en 'sable’ rouge ou cinabre commun, qui correspond au sud, au trigramme Li, au Cœur (Xin) et au Yang. Du sable rouge (Dragon vert transmuté par le Feu) naît le Mercure. D’autre part, il y a du plomb noir qui relève de l’Eau, des Reins, du trigramme et du nord. Du plomb naît l’Argent ou le Métal blanc ou Tigre blanc qui relève de l’ouest et des Poumons. Lavés et purifiés par l’Eau et le Feu, il devient le « germe jaune » qui relève de la Rate et de la Terre, c’est-à-dire du Centre » (LongHu YuanZhi, dynastie Tang).
- De même que le Plomb est parfois confondu avec l’Eau qui lui donne naissance, de même le Mercure (ou Métal-Qian) se confond parfois avec le Feu. C’est sous l’action du Feu, intérieur et immatériel que le Plomb se purifie et devient Argent ou Tigre Blanc, de même que le Mercure volatile ne peut être fixé que par le Plomb, le Plomb ne peut s’élever sans le Feu. Ce Feu n’est pas celui de la pensée du Cœur-Mental ni des Reins (Yu Yan) mais le Feu naturel qui est dans le corps.
Le Feu dans l’alchimie interne :
- Le Feu du Ciel ou le Mercure chauffant et purifiant le Plomb donnent l’Argent ou le Tigre blanc qu’il fait monter, contrairement à son mouvement naturel qui est de descendre. Le Feu est à la fois purificateur et moteur de l’œuvre. Le Plomb et le Feu sont les deux secrets de l’alchimie (Peng Xiao), ce qui n’empêche pas l’auteur de dire par ailleurs que l’essentiel de l’alchimie réside dans le Métal et l’Eau. Le régime du Feu est affaire toute personnelle, qui varie avec chacun.
- L’Œuvre se divise en deux grandes parties : la première est un Feu martial et Yang, purificateur qui est de l’ordre de l’action et se rattache au printemps et à l’été, la deuxième relève du « Feu civil », de l’inaction et du repli, de la quiétude, liée à l’automne et à l’hiver. La première sert à purifier le Plomb, commence avec le Grand Yin et avec la naissance du Yang (la cueillette). Elle se poursuit avec l’accroissement du Yang. La deuxième partie purifie le Mercure et accroît le Yin. Certains auteurs mettent la phase de l’inaction AVANT la phase de l’action. Ils mentionnent qu’il est important de « savoir s’arrêter » dans la croissance du Yang pour éviter que le travail ne soit annihilé. [à l'image du Feu trop fort qui fait disparaître la forme du Métal - NDLR]
Le Xin :
- Le mot Xin est généralement traduit par « Cœur-Mental. Il prend parfois l’acception d’ "Esprit" au sens alchimique de « Réalité ultime ». Certains Maîtres comme Lu Xianshan l’identifie au Tao : « Il n’y a qu’un seul Xin », « Xin est la Racine de l’univers », « L’homme en état de quiétude est le Xin du Tao ».
- Tous les dharmas sont issus du Xin. Le Xin humain est difficile à pacifier.
- Le Xin est destiné à fusionner avec le Tao. Toute création vient du Xin. C’est la conscience, non en tant que connaissance mais en tant que créatrice.
- Le Xin est l’organe de la connaissance intuitive vs la connaissance graduelle, laborieuse et analytique (GeWu).
- Xin (comme Xing) connote les organes de la connaissance intuitive et l’immanence en l’homme d’une présence transcendante et éternelle.
- Le Xin (Cœur-mental) est identifié au Xing. Le Xing est la quiétude, la substance du Xin. Le Xin est l’organe, l’instrument par lequel on accède au Xing. Certains textes (bouddhistes) donnent la priorité au Xin, à la prise de conscience intuitive aux dépens des pratiques corporelles. Au Xin est rattaché le Yi, la pensée ou l’idée créatrice et directrice. Le Xin est la conscience (Jue) et le Yi la pensée (Si) mais ils ne peuvent être séparés.
- Le Yi est en relation avec la Rate (le viscère du Centre) qui appartient à l’agent Terre. Il a le Xin pour maître. Le Xin est l’élément dynamique.
Les 3 plans :
- LiDaochun distingue 3 plans. Chez l’Homme, le Plan Ciel/Terre s’exprime en terme de Xing (forme) et Ti (Corps, substance) ; le plan Qian/Kun en terme de nature (Xing) et passions (Qing) et celui de Yin/Yang en terme d’esprit (shen qui est yang) et souffle. Au plan des symboles, nous avons dans le même ordre, les couples Dragon/Tigre, Cheval/Bœuf et Corbeau (solaire)/Lièvre (lunaire). Au plan alchimique, ce sont les couples Chaudron/Fourneau, Or/Terre, Plomb/Mercure.
- Le premier plan, inférieur, le Fourneau et le Chaudron désignent le corps et l’esprit. Les ingrédients sont l’Essence (jing) et le Soufle. Le Tigre et le Dragon sont le Cœur et les Reins. La Passe Mystérieuse se situe entre le nombril et les reins. La véritable semence est le Jing. Le but consiste à faire fusionner les 5 agents. Dans le 2è, le niveau moyen, Qian et Kun correspondent au Chaudron et au Fourneau, et Kan et Li à l’Eau et au Feu. Les 5 agents sont les 5 instances psychologiques (jing, shen, hun, po et Yi). Le Tigre et le Dragon désignent le corps et l’esprit. La véritable semence est le Souffle. La passe mystérieuse se situe dans le Niwan (cerveau). Le but consiste à unir l’essence et l’Esprit. Dans le 3è plan, le supérieur, le Chaudron et le fourneau sont le Ciel et la Terre ; l’Eau et le Feu sont le soleil et la lune ; le Dragon et le Tigre désignent la nature (Xing) et les passions. La véritable semence est la pensée discursive. La Passe mystérieuse est le Cœur, le Centre. Le but est atteint lorsque nature et passions sont unies. Le plan est ici plus exclusivement cosmique et psychique.
- Très schématiquement, on peut retenir que le plan inférieur se situe au niveau psychophysiologique, que le plan moyen fait intervenir une dimension cosmique (soleil et lune) et symbolique (Qian et Kun, Kan et Li) tandis que le niveau supérieur relève de la métaphysique et de la méditation spirituelle. Rien de tout cela ne doit cependant être pris au pied de la lettre.
- Les 3 plans forment les 3 voies : la voie du Cœur (Ciel), la voie du corps (Terre, matérialité, substance) et la voie de l’idée, du Centre, du Yi (sentiment d’humanité).

Le renversement :
- Le principe de renversement (jiandao) est un des principes de base de l’alchimie intérieure. « Qui va à rebours trouve l’immortalité ». Les adeptes qui retournent à l’Origine s’ «auto-réengendrent ». Le sens contraire fera que l’Eau engendre le Métal et le Feu engendre le Bois. C’est du Nord à l’Ouest et du Sud à l’Est que se fait la giration contraire. Le temps est remonté. L’écoulement normal du temps mène à la mort. Qui cherche l’immortalité remonte le temps et va vers la jeunesse et la naissance.
- Le « renversement » (alchimique) consiste en ce que, au lieu que le Xing soit le Mercure qui est dans Li et le Ming le Plomb qui est dans Kan, l’inverse se produit. Le Xing est le Plomb qui est dans Kan en bas et le Ming le Mercure qui est dans Li en haut.
- Le paradoxe du renversement consiste à considérer Li comme féminin et Kan comme masculin. De même paradoxalement, le Feu descend et l’Eau monte puisque Li est feu et Kan est Eau. Il s’agit donc d’un Feu féminin et d’une Eau masculine, d’un « feu aqueux » et d’une « eau ignée ». Extraire le Métal qui est dans l’Eau est au rebours de l’ordre traditionnel d’engendrement et de ce qui s’est passé lors de la formation du monde où le Yang s’est élevé pour faire le Ciel et le Yin est descendu pour faire la Terre.
- En renversant l’espace-temps, les taoïstes renversent les valeurs « négatives » de la vie considérée comme une perte d’énergie, une dissolution, une dissémination et lui donne une valeur positive d’émanation continue et créatrice du monde, où début et fin se rejoignent.
Devenir un "Homme véritable" (Tchen Jen) :
La pratique du NeïDan est supposée nous transformer en "Homme véritable" (Tchen Jen). L'"Homme véritable" est supérieur au Saint dans la hiérarchie spirituelle car le premier "s'ancre dans le Ciel" quand le 2è se contente du plan terrestre. L'ouvrage d'I. Robinet "Méditation taoïste" précise notamment les points suivants :
- L'Homme véritable en sa nature est uni au Tao, il est dans la plénitude comme s'il était vide. (...) Le Tao est le lieu où s'ébat l'Homme véritable.
- Le corps comme du bois sec, le Cœur comme de la cendre morte, il oublie ses 5 viscères et amenuise son corps.
- Sans apprendre il sait ; sans regarder, il voit ; sans agir, il accomplit ; sans s'y appliquer, il discerne.
- Il n'est rien qui l'éjouisse et aucun être ne peut le troubler.
- Vie et mort ne lui sont qu'un même changement, les 10 000 être une même entité.
- En lui le sommeil est sans rêves.
- Il renverse fin et origine.
- Il se repose en un lieu sans angles ni détour (...,) il n'a pas de forme, immobile, pas de corps.
- Il commande aux démons et aux esprits.
Livre de référence :
"Introduction l'alchimie intérieure taoïste : de l'Unité à la multiplicité" paru en 2012 aux éditions du CERF.
